Nouveauté

La faute à l’Œdipe ?

petit coeur mamanÀ mon cabinet, selon l’âge de leur enfant, bon nombre de parents consultent pour des retards de propreté, pour une scolarisation difficile, pour de la désobéissance à la maison et plus tard pour des difficultés à la crise d’adolescence. La plupart quête un sens derrière les dysfonctionnements, démarche certes louable mais si souvent stérile.

Aimer trop, mal, pas assez…
Combien de fois, alors que j’évoque des problèmes bien réels d’éducation et que je tente de redonner du bon sens, ai-je entendu cette remarque : «C’est le complexe d’Œdipe ! ». La réalité ne saurait être en cause, l’origine des troubles de l’enfant ou de l’adolescent se trouve enfouie, refoulée dans l’obscur psychisme. Tout le monde y croit : le complexe d’Œdipe joue un rôle fondamental dans la structuration de la personnalité et dans l’orientation du désir humain : c’est le « pile, je gagne », « face, tu perds » de la psychanalyse.

Toujours la faute à l’œdipe ?
Ainsi, un enfant manifeste de gros problèmes de comportement à la maison – insulte les parents, agresse la fratrie, refuse tout interdit – c’est qu’il est en plein Œdipe. La maman est un peu fusionnelle ? Voilà la cause de l’agressivité de l’enfant qui lutte contre son désir incestueux… Le papa est autoritaire ? L’enfant craint la castration, se révolte pour exister en tant qu’être sexué… Tous les cas de figures sont permis dans cette hollywoodienne « structure triangulaire du complexe d’Œdipe ». Et quand j’écoute ces patients adultes qui émergent d’un « long travail sur eux », je suis toujours atterré d’entendre les mêmes histoires : « Vous savez, mes rapports avec ma mère ont toujours été difficiles… », « Avec un tel père, je ne pouvais pas exister… ». Et combien de parents vont désormais marcher sur des œufs lorsqu’il s’agira d’éduquer à leur tour « parce qu’il se joue quelque chose d’autre, hors réalité… ».

Le principe de réalité
Parents, redevenez rationnels. L’Œdipe freudien n’est qu’une fantasmatique mise en scène. La réalité est beaucoup plus simple : votre enfant a besoin de tendresse, de câlins, de stimulations, de protection, de valorisation, d’amour, mais rien d’incestueux dans tout ça ! Il a tout autant besoin de frustrations, d’interdits et de conséquences s’il transgresse, bref de désamour passager mais rien de castrateur dans tout ça !

Le complexe de Thétis
Et puis s’il faut complexifier pour être entendu, faites plutôt attention au « complexe de Thétis » (Cette déesse de la mythologie grecque, qui s’efforçait de rendre ses enfants immortels en les plongeant dans l’eau glacée du Styx, métaphore pour signifier qu’il faut les armer contre les futures adversités de la vie). Un enfant qui ne serait qu’aimé sera tout simplement vulnérable au principe de réalité tout court. Cette souffrance se développera devant tous les aléas de l’existence. Et l’enfant risquera, désormais, non pas de désirer “inconsciemment” son père ou sa mère, mais de ne plus désirer “consciemment” la vie…

Didier Pleux

0

Your Cart